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  Cette récente forme d’art devient de plus en plus présente dans notre quotidien. En effet, quoi que nous fassions, nous sommes susceptibles de croiser l’une de ces formes d’expression sur les murs qui nous entourent. Né dans les cités américaines dans les années 1960, il se développe en France autour des années 1990 dans les quartiers plus bourgeois.

 

                                                                          1) La rue, un espace libre

 

  Le premier lieu d’expression est la rue, libre, accessible à tous même si elle présente des dangers judiciaires. La rue est un endroit propice à l’exposition de tags et de graffitis. Afin d’évoluer, les graffiteurs doivent mobiliser audace, dépassement de soi, mais aussi transgression des règles et des lois au nom de leur créativité et de leur imagination.

  Comme notre sondage a pu le montrer précédemment, chaque individu ne voit pas la chose d’une même façon. Certains graffitis sont considérés comme des œuvres d’art, alors que d’autres ne sont, à la base même de la création, qu’une envie pure et simple de « jeter violemment  son nom à la face du monde ».

Certains graffiteurs paieront de leur liberté et de leur santé le fait de n’avoir pas su doser le danger nécessaire à l’expression de leur point de vue. La rue reste un milieu dangereux pour tout graffiteur qui se heurte parfois aux altercations possibles avec toute personne présente ou contrôles  judiciaires.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                     Festival "Rue-Stick" à Puteaux

 

  Des festivals d’art urbain sont organisés, au même titre que ceux de musique ou de danse. Ils ont alors lieu dans la rue, comme par exemple le festival « Rue-Stick » organisé depuis 2011 à Puteaux. Celui-ci réunit plusieurs artistes et plusieurs techniques comme le cellograff, le 3D street painting, l’affichage (collage) et le graffiti. Il laisse accès à tous puisqu’il se déroule  devant la mairie avec un mur d’expression libre mis à disposition des artistes.

  En effet, dans certaines villes françaises ainsi qu’à l’étranger, les communes laissent accès à des espaces qui n’attendent que l’imagination des artistes. La rue représente un espace infini de liberté et de découvertes multiples. Mais elle est aussi un espace d’interdits et de possibles, ce qui attire d’autant plus les graffiteurs qui recherchent avant tout l’affranchissement.

 

  Des groupes, appelés souvent « posses », « crews », « squads » ou plus communément « gangs » permettent aux graffiteurs de s’unirent pour réaliser leur passion ensemble, pour ajouter un nom collectif à leur nom individuel. Ils se constituent en fonction des affinités créatives et des styles typographiques. Dans l’univers du graffiti, la lettre revêt une importance particulière, les couleurs, ornementations et embellissements n’étant que des fioritures.  Le lettrage n’est nulle part aussi développé raffiné et travaillé que dans le graffiti. Ces groupes sont souvent constitués par origines ethniques comme c’est le cas à New York. Les graffitis de gangs sont rarement faits pour être esthétiques, mais pour marquer les limites d’un territoire et vous prévenir de ne pas y pénétrer.

  Banksy a d’ailleurs, dans sa jeunesse, fait partie d’un groupe de graffiteurs, le « Bristol’s DryBreadZ Crew » (DBZ).

 

Après avoir exécuté des fresques ou taggué des murs, les artistes murissent et décident parfois d’évoluer pour s’installer dans des ateliers.

 

         

                                                                                       2) L'atelier

   L’atelier est le tremplin possible pour passer de la rue c'est-à-dire  de l’anonymat, de la rébellion voire d’une forme d’anarchisme à un début de reconnaissance de l’artiste, d’officialisation de ses activités qui deviennent non plus illicites mais légales.

   Il n’existe pas un atelier type, mais une multiplicité de formes. Ils peuvent être individuels ou collectifs, lucratifs ou non, ouverts ou privés…

  Lorsqu’il est collectif, c’est un partage d’expériences au sein même de l’atelier, un rassemblement d’univers inédits cristallisés à l’occasion d’expositions. Le partage d’expériences et le rassemblement des artistes leur permettent parfois d’évoluer ensemble, mais dans d’autres cas, seul le local est partagé puisqu’ils pratiquent leur activité individuellement.

  Un atelier c’est parfois le repère d’un artiste accompli, il y entrepose ses bombes ou imprime ses futurs collages. 

 

  Les ateliers permettent aux artistes de proposer aux professionnels ou au grand public, par l’intermédiaire d’internet ou du bouche à oreille, leurs créations ou leurs services.

L’atelier Anthracite, situé dans le 7e arrondissement de Lyon, a ouvert exceptionnellement ses portes à l’occasion de l’exposition « Vortex V ». En effet, Il n’est pas toujours accessible en temps habituel. Les 5 artistes qui le composent ne sont pas connus de tous et souhaitent, pour la plupart, rester anonymes. Il est difficile de leur faire dévoiler leur signature murale. Leur relatif anonymat leur permet de ne pas brider leur créativité ou leur inspiration.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                          Atelier Anthracite, 7e arrondissement lyonnais

 

   Quasi similaires aux ateliers, les collectifs regroupent des artistes dans le but de créer des compositions murales, ou encore d’intervenir pour des institutions, des entreprises privés pour des façades ou des intérieurs, des particuliers pour des chambres d’enfants ou bien des décorations ou des toiles, des MJC et des centres sociaux pour des projets pédagogiques. On trouve notamment le collectif La Coulure qui propose des projets variés et globaux dans la région lyonnaise.

 

  Les collectifs sont des organisations sous forme associative, de plusieurs projets artistiques indépendants mais reliés par une ligne esthétique et affinitaire. Leur vocation première n’est pas d’être des entrepreneurs de spectacle. Ils fonctionnent davantage comme des marques qui permettent à des projets artistiques émergents de gagner en visibilité par l’intermédiaire d’un nom collectif.

Certains graffiteurs interviennent auprès d’ateliers qui proposent des initiations au graffiti, par la présentation des codes, des règles, de l’histoire et de la culture de celui-ci. Ils peuvent également y enseigner les différentes techniques et pratiques.

  C’est l’alliance d’une volonté de démocratisation de cette discipline et l’intérêt qu’il suscite qui fait le succès de ces ateliers pédagogiques.

 

 

                                                                                     3) Les galeries

 

  Ce sont souvent les galeristes qui, ayant repéré un Street artiste,  souhaitent le faire exposer au sein de leur galerie. Ils sont donc à l’initiative de la loi de l’offre et de la demande dans le secteur de l’art contemporain.

 

  Les graffiteurs qui acceptent d’exposer dans ces galeries ont souvent un cheminement important à parcourir : l’acceptation de la reconnaissance et de la légitimité, d’un autre mode de fonctionnement comme la création en tant que source de revenus et non plus comme loisir ou expression de la contestation. Ils gagnent alors en valeur mais perdent une part de leur liberté, ainsi que l’adrénaline et la contestation qu’ils pouvaient ressentir et vouloir faire partager lors de leur expression dans la rue. Ils abandonnent un art urbain éphémère, gratuit et subversif. Ils renoncent également à leur marginalité, deviennent dépendants du marché et des marchands d’art et renient leur idéalisme qui est que « la rue est  une galerie » comme l’ont pensé Jean-Michel Basquiat et Andy Warhol.

 

  Certains recherchent à une période de leur vie une reconnaissance de la société, des autres artistes ou de leur milieu. Ils aspirent ainsi à devenir une référence aux yeux de leurs pairs. Peu d’entre eux parviennent à sortir du lot et à se démarquer. Ceux qui réussissent sont les plus doués artistiquement et peuvent ainsi évoluer et devenir artiste peintre comme Jean-Michel Basquiat ou Andy Warhol. D’autres se perdent dans un excès de rentabilité ou de mercantilisme et ne sont plus alors considérés comme graffiteurs par leurs compagnons de route  comme Banksy.

  Banksy d’ailleurs qui accepte que ses réalisations soient découpées pour être vendus aux enchères. Car, lorsqu’il sort de son contexte, le Street Art perd son sens et sa valeur. Cette démarche n’a-t-elle pas pour vocation de dénaturer la fonction première de l’expression murale ?

On est alors bien loin de l’époque ou le graffiti était une revendication libre qui consistait à utiliser l’espace public en tant que tribune dédiée à l’art et aux idées. Une question est soulevée : Certains graffiteurs n’ont-ils pas perdu de vue cette approche ?

 

  La présence de tagueurs dans des galeries et leur reconnaissance par le grand public a conduit certaines villes à organiser des expositions, séduisants un public nombreux : le Tate Modem à Londres avec carte blanche à 6 artistes reconnus afin qu’ils créent des œuvres sur la façade du bâtiment, l’exposition « TAG » au Grand Palais, l’exposition « Né dans la rue » à la fondation Cartier pour ne citer que les plus récentes.

C’est aussi du fait de leur popularité que des cours de Street Art ont été crées dans la majorité des écoles des Beaux Arts en France et qu’une UV de Street Marketing a vu le jour au sein d’HEC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                        Exposition "TAG" au Grand Palais

 

 

  A la question de la légitimité de la présence d’une expression artistique marginale, car hors-cadre, aux côtés d’arts plus conventionnels, le philosophe Alain Milon répond : « L’art est une figure de résistance. Les impressionnistes, en totale rupture avec l’art néo-classique, étaient considérés comme des marginaux. Une véritable forme artistique est forcément une expression de résistance. Le graff n’est pas plus ou moins résistant qu’une autre forme d’art, quand il a un propos ».

  A le faire entrer en galeries et musées, le Street Art va certainement gagner en valeur marchande mais aussi perdre ce qui faisait sa force : la subversion.

… Qui  peut  devenir  le  point  de  départ  d’une nouvelle  forme  d’art reconnue.

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